Demi-sommeils 1
SIESTE
Ayant tiré les rideaux sur un jour éclatant, et la nuit ne m’ayant porté que la facture de ses mauvais conseils, je décidai d’agir. Revêtu d’un léger complet blanc, je sortis sans chapeau et me glissai le long des remparts sans ombre afin de passer inaperçu, car, aperçu hélas, serai-je jamais compris !
Au croisement de la rue Gabriele d’Annunzio, aux pavés ronds, je tombe sur un jeune marchand d’oranges adossé, jambe repliée, à un mur chaulé de bleu. Il soupèse nonchalamment un fruit du geste maladroit d’un jongleur affranchi. Il m’a vu, plissant les yeux dans la lumière. Bonjour ! lui dis-je avec désinvolture. Bonsoir ! dit-il en s’inclinant d’un air farcesque. En voilà trop ! Je me promène… répliquai-je de toute ma hauteur, la gorge nouée. D’un mouvement circulaire imperceptible du menton, il fait mine, sourcils levés, d’approuver cette évidence. A la bonne heure, tout de même !
Eh bien, je rentre mes amis, puisqu’il en est ainsi ! À ne pas vous revoir à la prochaine !
Yves André Demi-sommeils